LE MAQUILLAGE : artifice ou célébration de la beauté féminine ?
« Idole, la femme doit se dorer pour être adorée » Charles Baudelaire
Le Graal cosmétique du moment : une peau saine, énergique et jeune. C’est le paradoxe de notre époque. L’offre de maquillage n’a jamais été aussi pléthorique, les innovations aussi abondantes et les tendances aussi variées… Et pourtant, les femmes veulent un maquillage qui reste invisible et qui s’oublie sous les doigts : des produits qui embellissent sans travestir, déposent un voile sur la peau et floutent les défauts sans matière, se voient immédiatement sans pour autant modifier la singularité du visage.
En remontant plus loin dans le temps, les fards colorés étaient mal vus au tournant du XIXe siècle, étant associés à la débauche et à la frivolité. Les femmes distinguées ne se maquillaient pas, disait-on à l’époque.
Curieusement, c’est un poète qui dignifiera les cosmétiques et bouleversera l’histoire de la séduction ! « Le maquillage n’a pas à se cacher, à éviter de se laisser deviner ». Pour Charles Baudelaire, le maquillage doit en effet s’afficher, s’assumer pour ce qu’il est, à savoir un artifice. D’autant que la femme, en se fardant, se « spiritualise ». Elle prouve par ce geste l’existence d’un esprit qui cherche à échapper au caractère strictement animal, corporel, matériel de sa nature. Ainsi, le trait du khôl autour de l’œil vient accentuer l’intensité de son regard et lui donner davantage de profondeur. Se poudrer, rehausser les lignes du visage par la couleur « rapproche immédiatement la femme d’un être divin et supérieur ». La femme passe le temps d’un instant de simple mortelle à déesse !
Alors, avec le retour aux sources et à l’authenticité, la femme d’aujourd’hui ne chercherait-elle pas d’une autre manière à révéler l’âme de son visage avec un éclat qui vient de l’intérieur pour tendre vers la Beauté éternelle en s’enveloppant du cosmos (selon le sens étymologique du mot cosmétique : s’orner, se parer) et ainsi témoigner chaque jour de sa grâce naturelle ?