Nous avons la MONTRE, mais vivons-nous à la bonne HEURE ?
« Il faut donner du temps au temps » Miguel de Cervantès
L’homme a depuis 3000 ans continuellement cherché à modéliser l’écoulement du temps. Mais les montres, pendules, horloges n’ont pas toujours existé ! Sans instruments pendant des millénaires, l’homme a mesuré le temps en observant les phénomènes naturels, la Terre et les astres : la succession du jour et de la nuit, les différentes positions du soleil dans le ciel, les phases de Lune, les marées… Ces cycles biologiques et climatiques qui, par leur effet répétitif, rythment nos vies. Aurait-on tendance à les oublier ?
Petits, nous apprenons en effet à l’école à lire l’heure, à représenter l’axe du temps, de gauche à droite, de hier à demain. Les évènements s’enchaînent les uns après autres, sans jamais reboucler. Quand ils sont finis, ils appartiennent au passé.
C’est ainsi que nous nous forgeons des croyances comme : « le temps, c’est de l’argent», « gagner du temps », « si tu ne prends pas le train en marche, il passera sans toi »… Bien que ces adages populaires évoquent différentes situations de la vie, ils ont tous en commun cette croyance fondamentale : ce qui est passé, est perdu à jamais. Ce temps linéaire est du coup devenu un adversaire. On veut en effacer les marques. Le ralentir. Le contrôler.
Ainsi aujourd’hui, la montre connectée ne compte plus seulement l’écoulement du temps. Sorte de coach d’un nouveau genre, ces outils à porter au poignet sont capables de mesurer une infinité de choses comme le nombre de pas fait la journée durant, le nombre de calories brûlées, le taux d’activité ou la qualité du sommeil. La maîtrise de tous ces paramètres fondamentaux doit permettre d’agir sur la santé et par extension de freiner l’irréparable outrage que le temps peut avoir sur soi.
C’est un des grands paradoxes de notre époque que cette difficulté à vivre le temps, alors qu’on n’en a jamais eu autant. Et avec l’avènement de la communication instantanée, l’urgence a envahi nos vies. Nous devons réagir «dans l’instant», sans plus avoir le temps de différencier l’essentiel de l’accessoire. Poussant notre productivité aux limites, nous perdons parfois de vue le sens de la vie. Toujours plus et plus vite …
Alors, face à ce changement de paradigme aujourd’hui, la clé ne serait-elle pas de se remettre à la bonne heure, de revenir au propre de l’être humain, de reprendre le pouvoir sur son temps ? Un temps qui calme les choses pour se concentrer sur l’essentiel, retrouver le rapport à la beauté, à l’émerveillement et renouer ainsi avec le rythme de la nature.
Article rédigé par Anne-Sophie Tournier, Présidente de L’HIRONDELLE